C’était comme ça à chaque fois. Il n’était jamais en retard, et pourtant, le jour de la rentrée, tout allait de travers, son réveil oubliait de sonner, la douche ne crachait autre jour que de l’eau froide, ses cheveux refusaient d’être coiffés et la fermeture de son sac se coinçait dans le tissu. Fermant la porte d’une main, enfilant sa veste de l’autre, tenant son cahier entre ses dents et courant déjà vers les salles de cours alors qu’il n’avait rien avalé pour le petit déjeuner, c’était un véritable désastre. Les couloirs étaient déserts, tout le monde devait déjà être installé et prêt à étudier.
Il arriva enfin devant sa salle, toqua discrètement et entra. Le professeur le dévisagea, mais il semblait ne pas avoir encore commencé son cours, par conséquent cette interruption ne devait pas tellement le déranger.. en théorie. Essayant d’être le plus discret possible, il monta les gradins. Plusieurs têtes se retournèrent sur son passage, aussi curieuses qu’indifférentes à vrai dire. Les rangées de tables étaient remplies d’étudiants confortablement installés, et la seule place qu’il repéra se trouvait au beau milieu de tout, là, vingtième rangée environ, entre la blondinette qui gribouillait sur ses feuilles en mâchouillant disgracieusement son chween-gum aux couleurs chimiques, et un redoublant tellement peu passionné par les études qu’il s’était déjà endormi sur ses livres alors qu’il n’était là que depuis quelques minutes. En poussant quelques soupirs exaspérés, tous les élèves de la rangée durent se lever les uns après les autres pour laisser passer le retardataire qui faisait de son mieux pour se faufiler entre les personnes et les tables sans marcher sur les pieds de personnes ou trébucher sur un sac abandonné par terre. Après un temps qui lui sembla interminable, il regagna sa place, et s’installa rapidement, s’étant déjà assez fait remarquer comme ça.

« Vandecaastel, c’est bien cela ? » s’éleva une voix grave depuis l’estrade, tout en bas.

Le jeune homme releva la tête, et remarqua que le professeur le fixait toujours et attendait une réponse. Il voulut acquiescer, sans savoir ce qui allait lui arriver, mais la voix lui manqua, et il fut s’éclaircir la gorge, ce qui sembla réveiller son voisin de table qui le regarda d’un œil surpris.

« Apolon Vandecaaste, monsieur. » répondit-il
« Nous étions justement en train de faire les groupes pour des exposés qui conteront pour le premier semestre. Et puisque vous semblez si insouciant, je vais vous mettre avec un nouveau, histoire de vous responsabiliser un peu. Voyons voir… Mmh.. Monsieur Joshua. Caleb Joshua. Vous me présenterez un travail sur le thème suivant : L’argent, un bien ou un mal ? Et bien évidemment, dernier arrivé, premier interrogé. Bien, continuons. Alexandra Sanchez avec.. »

Apolon balaya la salle du regard en espérant que le dénommé Caleb lui fasse un signe. Il scruta tos les visages. Quelques uns se tournèrent vers lui, mais c’étaient soit des personnes qu’il connaissait déjà, soit des filles qui lui faisaient des sourires niais mais qui en aucun cas ne pouvaient porter un prénom de garçon. Il continua donc à chercher du regard qui pouvait bien être le nouveau. Enfin, il remarqua celui qui pouvait être son camarade d’exposé. Son cœur manqua un battement.